JAMES MAC GAW

La fin des Temples – 2020

(Soleil Zeuhl 59 // CD) 

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LIEN Bandcamp

La musique de l’album « La fin des Temples » a été écrite par James MAC GAW en 2004, alors qu’il était membre de MAGMA et de ONE SHOT. Cette longue pièce musicale a été composée en hommage à la musique de MAGMA et à Christian VANDER.

En 2018, James réunit un ensemble de musiciens afin de monter le morceau puis de l’enregistrer en vue d’une sortie CD. Les sessions d’enregistrement ont commencé en 2019 et se sont achevées au printemps 2020, James officiant en tant que directeur artistique et producteur du projet.

Sébastien ROCQUEFELTE : chant (lead)
Antoine THARREAU :
fender rhodes & divers claviers
Anthony LECOMTE :
basse électrique
Louis GODART :
guitare
Fabrice FOSSE :
marimba
Daniel JEAND’HEUR :
batterie & percussions
Bruno RUDER :
Fender Rhodes et clavier
Mathilde BORSONI, Solène GENDRE & Didier CORBEL :
chœurs

 

Depuis le printemps 2015, James Mac Gaw a mis entre parenthèses son activité de guitariste (dans Magma et One Shot principalement) pour lutter contre la maladie – un cancer particulièrement agressif, qu’il a su tenir en respect, déjouant les pronostics les plus pessimistes, à défaut d’avoir récupéré, à ce jour, la capacité de reprendre du service en tant qu’instrumentiste. Ce triomphe sur l’adversité force en soi le respect, mais en parallèle, Mac Gaw a réussi un autre exploit : la réalisation de ce premier album sous son nom, interprété par un ensemble de dix musiciens comprenant notamment ses deux ex-acolytes de One Shot, Daniel Jeand’heur et Bruno Ruder.
Les racines de La Fin des Temples remontent à la seconde moitié des années 2000, lorsque Mac Gaw avait entrepris l’écriture d’une ambitieuse suite qu’il  destinait à Magma. Pour des raisons sans doute multiples, et pas uniquement liées au monopole de fait de Christian Vander sur ce terrain (Philippe Bussonnet avait bien réussi à imposer une de ses compositions sur un CD-single en 1998, une première depuis l’ère VanderTop), le projet n’avait pu alors se concrétiser, et il aura fallu ces circonstances personnelles difficiles pour le réactiver.
Le résultat est un objet musical délicat à appréhender. Pas tant par le fait que son auteur nominal n’en soit pas partie prenante en tant qu’instrumentiste : dans un champ musical voisin, des précédents existent, comme Roger Trigaux (Présent) ou feu Gérard Hourbette (Art Zoyd), pareillement empêchés mais néanmoins compositeurs prolifiques. Non, l’hésitation vient plutôt du rapport qu’entretient La Fin des Temples avec Magma : faut-il y voir un pur exercice de style, un hommage assumé à Christian Vander, ou est-ce un point de vue trop réducteur ? Le remerciement appuyé adressé par Mac Gaw à son mentor dans le court texte qu’il signe dans le livret n’incite pas spécialement à une telle prise de distance, pas davantage que la physionomie du groupe, identique à celle de Magma jusqu’aux remaniements de l’an dernier : guitare (Louis Godart), deux claviers (Ruder et Antoine Tharreau), basse (Anthony Lecomte), batterie (Jeand’heur), marimba (Fabrice Fosse), et quatre chanteurs (Sébastien Rocquefelte, déjà entendu dans l’Eléphant Tôk de Jeand’heur, plus Mathilde Borsoni, Solène Gendre et Didier Corbel aux chœurs).
Et l’écoute confirme que, sans être dans le pur décalque, on se situe résolument sur un terrain zeuhl. Le (un peu trop) long prélude atmosphérico-bruitiste, impressionnant par son travail sur les textures sonores, pourra rappeler davantage certains albums tardifs d’Univers Zéro, mais passé le prélude Rhodes/chœurs qui lui succède, le doute n’est plus permis quant à l’essence magmaïenne du propos. Les riffs cycliques à l’unisson de la basse et de la guitare saturées, les Rhodes cristallins, la batterie implacable, les chœurs amples : tous les ingrédients familiers sont réunis dans une mise en scène soignée, à base de variations d’intensité, de mise en vedette, rarement prolongée, de certains instruments (le synthé et le Rhodes), et d’interventions régulières des chœurs.
L’insertion de points d’index dans le déroulement de la suite semble relever de considérations pratiques plus qu’elle n’est censée suggérer la présence de véritables « mouvements ». Parmi les 9 plages, pour certaines très courtes (à peine 30 secondes pour « Forteresses », accalmie à deux Rhodes), les plus consistantes sont assurément « Incendie des Raisons » et « Les Boussoles des Mille Dimensions ». La première fait monter l’intensité par ses polyrythmies binaire/ternaire très magmaïennes et la seconde, articulée autour d’un motif cyclique joué à l’unisson par la guitare et le marimba, constitue le point culminant de l’œuvre avec ses chœurs emplis de ferveur communicative (on pense presque plus à Setna qu’à Magma) et l’émancipation de la batterie de sa fonction purement rythmique, qui permet à la musique de prendre pleinement vie, s’extrayant du cadre potentiellement inhibant du studio, a fortiori pour une composition jamais jouée live.
La Fin des Temples est réjouissant à plusieurs titres. Il révèle un compositeur qui, sans égaler son modèle, montre sur le terrain de la « longue forme » zeuhl un potentiel qu’il n’avait qu’effleuré au sein de One Shot, entouré de collègues plus prolifiques, et offre au label Soleil Zeuhl un nouveau jalon discographique d’exception dans un catalogue qui (rééditions et nouveautés confondues) en compte déjà un certain nombre. Tout au plus pourra-t-on lui reprocher sa brièveté, mais après tout, ce format « long EP », d’une trentaine de minutes, a depuis quelques années la préférence de Magma (Slag Tanz ou le dernier-né Zëss). Espérons que cette réussite et l’accueil enthousiaste qu’elle ne manquera pas de susciter, inspirera à son auteur une suite, qu’elle prenne ou non une forme aussi magmaïenne.

Aymeric LEROY – Pour BIG BANG MAGAZINE